Les élections européennes approchent, alors que nous connaissons un moment de défiance à l’égard de l’Europe et une phase de retour en force des nations.
Pour la première fois un pays de l’Union veut la quitter. Le développement de l’illibéralisme de quelques pays pose la question de la signification de l’appartenance à l’Union européenne. Les tensions Nord-Sud au sein de l’Union sur fond de méfiance réciproque ne permettent plus d’avancer dans la construction d’une zone euro, pourtant aujourd’hui encore bancale.
En outre, on assiste partout en Europe à la montée de mouvements populistes, recherchant des solutions simplistes à des problèmes réels et des boucs émissaires faciles. Ces mouvements sont la manifestation politique et électorale d’une demande d’identité, de sécurité et de protection. Conséquence elle-même, en Europe comme ailleurs, de la peur d’un affaiblissement des classes moyennes et d’une réponse perçue comme inadéquate ou insuffisante de la part des gouvernements.
Mondialisation, révolution technologique, immigration mal maîtrisée et terrorisme islamiste sont les ferments de cette inquiétude. Le tout sur fond d’une déconstruction progressive des organisations multilatérales et des règles et principes de la communauté des nations établis après-guerre. Donc d’une montée de jeux non coopératifs potentiellement très dangereux.
Ce qui réunit les peuples
Il est donc urgent de bien s’interroger en Europe sur la bonne façon de réagir à cette défiance. Il serait vain de nier les défauts intrinsèques de l’Europe. Il faut regarder en face les véritables problèmes et nommer les questions d’immigration mal gérées au niveau communautaire, les effets de l’élargissement européen qui a fait perdre de la lisibilité et a dégradé l’efficacité de la gouvernance de l’Union. De même, doit-on pointer la mise en place d’une zone euro qui, parce qu’incomplète, a engendré un certain nombre d’effets indésirables.
Même si elle est bien difficile, la seule voie possible est de rechercher inlassablement à mettre en place et à renforcer les jeux coopératifs en Europe. Face à l’entropie actuelle, il est urgent en premier lieu de rappeler avec force ce qui réunit les peuples européens et ce en quoi l’Europe leur apporte un mieux-vivre : la protection et l’efficacité d’une économie sociale de marché ; l’importance cruciale de l’Etat de droit, avec le caractère inaliénable de la liberté de la personne et de la liberté de la pensée critique, qui va de pair avec celle de la presse ; la laïcité qui permet le vivre-ensemble ; les bienfaits du marché unique et de la libre circulation des personnes ; sans oublier la paix bien entendu.
Ouvrir les yeux
Nous assistons aujourd’hui à un gigantesque combat entre les Etats-Unis et la Chine pour un nouveau partage du monde. Ouvrons vite les yeux, nous autres Européens, si nous voulons que nos peuples conservent la maîtrise de leur destin et pèsent encore sur le cours de l’histoire. Pour exister entre les deux géants du nouveau monde, il nous faut une Europe forte.
Industrie à forte valeur ajoutée, nouvelles technologies, transition écologique, défense commune comme vient de le proposer le couple franco-allemand, flux migratoires, etc., tels sont les thèmes qu’il nous faut travailler ensemble au plus vite. Pour peser davantage sur le nouvel ordre du monde. Il nous faut, en outre, une vision propre de l’organisation du commerce international. Enfin, sur la base d’une zone monétaire complète et solide, recherchons une plus forte internationalisation de l’euro. Appuyée sur une Europe stratège, un euro plus utilisé mondialement est en effet utile pour éviter les inacceptables règles unilatérales d’extraterritorialité imposées par les Etats-Unis.
Rien ne se fera sans que nous partions pragmatiquement de projets concrets sur les différentes thématiques précitées, en nous alliant avec nos voisins allemands. Ni sans que tous, où que nous soyons et qui que nous soyons, y concourions à notre mesure !