Catégories
Banque Management

Résultats Annuels 2022 – Groupe BRED

Cliquez sur l’image ci-dessous pour télécharger le pdf complet

Catégories
Banque Événement Management

Présentation de « Crises et mutations : petites leçons bancaires » au cabinet CARLARA et à « La Correspondance économique ».

Lors d’une intervention organisée par le cabinet CARLARA, M. Olivier KLEIN, directeur général du groupe BRED, professeur affilié en économie et en finance à l’Ecole des hautes études commerciales, a présenté son livre « Crises et mutations : petites leçons bancaires »

Lors d’une intervention organisée par le cabinet CARLARA et animée par Me Edouard de LAMAZE, avocat à la cour d’appel de Paris, associé cofondateur du cabinet Carbonnier Lamaze Rasle-CARLARA, maire de Bois-Héroult et conseiller régional de Normandie, M. Olivier KLEIN, directeur général du groupe BRED, par ailleurs professeur affilié en économie et en finance à l’Ecole des hautes études commerciales-HEC, a présenté son dernier ouvrage intitulé « Crises et mutations : petites leçons bancaires. Choc des ruptures ou gestion sereine de la transformation ? » (Ed. Eyrolles).

Un livre sur l’industrie bancaire qui n’a cessé de se transformer, comme l’a dit Me de LAMAZE en introduction, ouvrage qui revient sur son histoire « en remontant au IIIe millénaire avant Jésus-Christ en Mésopotamie pour arriver jusqu’à la libéralisation financière au milieu des années 1980, la crise des crédits subprimes qui a éclaté en 2007 aux Etats-Unis, et qui aborde in fine, la menace actuelle d’une désintermédiation opérée par les banques en ligne, low-costs, les fintechs et bientôt les Gafam ».

En réaction à certaines sirènes annonçant la fin de la banque commerciale, M. Olivier KLEIN démontre que son utilité économique et sociale demeure intacte, celle-ci résidant dans sa fonction de centrale de risque et de financement de l’économie réelle. Ce en quoi la banque commerciale incarne l’essence même de la banque. Ce qui ne la dispense pas pour autant de la nécessité de se réinventer.

Mais l’ouvrage dépasse ce plaidoyer et confronte plus largement les notions de crise et de mutation, les crises étant des mutations mal anticipées, faute de la compréhension nécessaire des mouvements de fond qui aurait permis une gestion responsable le moment venu. Le néologisme tant utilisé de « disruption » ne fait que révéler une impréparation coupable face aux transformations en cours. Là où, à l’inverse, M. KLEIN invite à la prise de recul pour mieux comprendre ce qui nous entoure en convoquant la philosophie et les sciences humaines pour penser les changements à l’œuvre autrement qu’en termes de rupture et de destruction.

Ainsi, la crise sanitaire que nous traversons conduit-elle à du nouveau ? s’interroge l’auteur. Ne serait- elle pas davantage l’occasion d’une accélération de la transformation qu’une rupture en tant que telle ?

Anticiper, c’est donc avant tout se laisser la possibilité de choisir et de décider. A cet égard, le livre de M. Olivier KLEIN développe une philosophie de l’action, de la décision politique et managériale. Il est plus largement un appel à tout gouvernement, à toute entreprise d’accompagner les mutations pour in fine co-construire le bien commun en s’appuyant sur l’intelligence et sur la sensibilité humaine.

Concluant son propos de présentation, Me Edouard de LAMAZE a fait un parallèle avec son propre métier d’avocat. La réflexion de l’auteur sur l’avenir de la banque commerciale, Me de LAMAZE l’a faite sienne en ce qu’elle peut s’appliquer au mot près à sa propre profession et plus généralement aux professions libérales dans leur ensemble, a relevé l’ancien délégué interministériel aux professions libérales qu’il fut de 1996 à 2002 et le président de l’Observatoire national des professions libérales qu’il est par ailleurs. Celui-ci partage la conviction de l’auteur de la nécessaire orientation de l’activité vers le conseil, véritable valeur ajoutée du service, et le recentrage sur l’humain, indissociable d’une certaine proximité géographique. Avec pour pierre angulaire, a terminé Me de LAMAZE, la dimension de tiers de confiance qui sous-tend ces métiers de service qu’ils soient financier ou libéral, sans oublier la protection des données personnelles des clients.

Penser les mutations pour éviter les disruptions

Le livre parle certes de banque mais aussi de bien d’autres aspects. La question de savoir comment penser un monde en mutation et comment conduire les entreprises dans un tel contexte sont au cœur de l’ouvrage. En un mot, « il faut penser les mutations pour éviter les disruptions », a résumé M. Olivier KLEIN dans son propos liminaire.

Dans un prologue, l’auteur met en exergue trois idées-forces : « penser les crises économiques et sociétales » ; « les entreprises, comme la société, sont des organismes vivants » ; « apprendre à penser plus ».

Penser les crises économiques et sociétales

Se référant à la définition gramscienne de la crise (« la crise est ce qui sépare le vieux du neuf »), M. Olivier KLEIN a avancé sa propre vision de la crise, à savoir « le moment où les modes de régulation, qui organisaient la société et l’économie de façon efficace, sont en train de changer parce que leur efficacité commence à baisser, et qu’apparaît progressivement, et souvent dans la douleur, un nouveau mode de régulation ». Un processus qui n’arrive donc pas brutalement, mais qui au contraire se fait dans le temps long. « Le temps de la mutation est long, et le vieux ne s’écroule pas d’un coup, il se transforme, se réorganise. Le vieux produit du neuf. Et il y a du vieux et il y a du neuf dans les nouveaux modes de régulation qui apparaissent », a-t-il relevé.

Les entreprises comme la société sont des organismes vivants

Partant du postulat que les entreprises et la société sont des organismes vivants subissant des chocs internes ou/et externes plus ou moins importants, M. KLEIN considère que pour que celles-ci parviennent à les surmonter, « il faut des règles, des routines, des façons de savoir y répondre presque de façon systématique et automatique ». Mais il leur faut également leur part d’auto- organisation. « Il faut une part d’autonomie des éléments qui composent nos entreprises, nos sociétés, pour absorber les chocs les plus forts. Pour se réorganiser, (…) chacun doit être capable de prendre en charge la partie du changement qui lui revient pour que l’ensemble s’organise de la meilleure façon pour l’avenir en intégrant les chocs et en les dépassant », a-t-il expliqué.

Dès lors, toute entreprise comme toute société, pour faire face aux crises, doit être un compromis entre ordre et auto-organisation, sans céder à un trop-plein d’ordre au risque que lors d’un choc trop fort, la mécanique se rompe. De même, ne faut-il pas un excès d’autonomie sans quoi au moindre coup de vent, la fumée se dissipe. « Le cristal est rigide, toutes les règles sont figées, mais au moindre choc, il casse », a-t-il dit renvoyant aux ouvrages de M. Henri ATLAN, biologiste, auteur de « Entre le cristal et la fumée », et du physicien et chimiste Ilya PRIGOGINE, auteur de « La Nouvelle Alliance » (entre les sciences dures et les sciences humaines) co-écrit avec Mme Isabelle STENGERS.

Apprendre à penser plus

Il faut apprendre à penser plus, apprendre à anticiper mieux, a estimé M. KLEIN qui reprend cette citation de Friedrich NIETZSCHE : « on apprend trop, on ne pense pas assez ». Quand on regarde le temps long et que l’on a une analyse un peu plus en profondeur sur les organisations, sur leurs contraintes, sur leurs contradictions, sur la façon aussi dont les chocs extérieurs peuvent survenir, alors, sans jamais avoir de boule de cristal ni de certitudes, on peut mieux anticiper les changements forts, a-t-il fait valoir. Pour cela, il faut « penser hors de la doxa », « hors du prêt à penser », il faut « essayer de se sortir du mimétisme ». Or, dans le secteur économique et particulièrement pour les entreprises cotées, le mimétisme est très présent, poussé par la bourse et les analystes financiers notamment qui partagent souvent une même vision.

Des mimétismes, M. Olivier KLEIN en cite trois formes. La première forme est un « mimétisme informationnel », à savoir « je fais comme les autres parce que je pense que les autres savent mieux que moi », parfaitement rationnel même s’il conduit tout le monde dans le même sens. La deuxième est un « mimétisme autoréférentiel », très présent sur les marchés financiers, qui consiste dans le fait que « peu importe de savoir si les autres pensent mieux que moi, les autres ne savent peut-être pas plus que moi, mais là où ils vont, c’est là où il faut que j’aille le plus vite possible, car la foule donne le sens ». Sur les marchés financiers, c’est toujours le cas. « La question n’est pas de savoir si l’on a raison ou tort mais il s’agit de prendre le départ avant les autres, que ce soit à la hausse comme à la baisse », a résumé l’auteur pour qui cette forme de mimétisme puissante est certes parfaitement rationnelle à titre individuel mais peut être, à l’inverse, complétement  irrationnelle  à  titre  collectif, poussant à la création de bulles spéculatives majeures. Enfin, la troisième forme de mimétisme, souvent présente dans la vie en société, comme dans la gestion des entreprises, est un « mimétisme normatif » qui vise à « faire comme les autres pour ne pas qu’on nous dise que l’on a échoué, dès lors que l’on respecte la ‘doxa' ». Reprenant la pensée de John Maynard KEYNES – « mieux vaut avoir tort avec les conventions que raison contre elles » -, cette dernière forme de mimétisme permet une certaine cohésion sociale, mais « n’amène pas toujours la meilleure anticipation des mutations », a noté M. KLEIN.

Questionné par M. Stéphane LAYANI, président-directeur général de la SEMMARIS (Rungis), sur les moyens à mettre en place pour lutter contre les mimétismes en matière financière, en prenant pour exemple « des licornes qui ont levé des centaines de millions d’euros » alors qu’aucun business model ne les sous-tend, M. Olivier KLEIN a abondé dans son sens, relevant au passage que la hausse des taux va changer la donne et assainir ce secteur de la tech.

Mais, au-delà, comment éviter ce genre de phénomènes ? Etudiant lui- même le mécanisme des bulles financières, M. KLEIN a souligné qu’elles « n’éclatent que parce qu’il y a eu un mimétisme de pensée à un moment donné fondé sur de mauvaises façons de penser ». Certes, il ne faut pas en faire une généralité car il y a des mimétismes positifs. En revanche, s’agissant de ces mimétismes autoréférentiels, contre lesquels il est très difficile de lutter, ils peuvent conduire à des bulles gigantesques et à des crises financières et sociales majeures. « Dans le domaine de la finance, contrairement à la production réelle de services ou de produits physiques » où l’on a un prix qui repose, le plus souvent, sur des éléments concrets, le prix fondamental des actifs financiers « n’est pas connu. C’est quelque chose qui par construction est autoréférentiel parce que leur prix est l’actualisation des revenus futurs projetés à l’infini ». Or, si l’on anticipe des revenus futurs très élevés, les prix s’envolent et des bulles se créent. C’est ce qui s’est passé avant 2000 aux Etats-Unis.

Que faire contre cela ? « Il faut mieux former, et la presse, et les analystes financiers » et leur donner la capacité de réfléchir en dehors des normes, a estimé M. KLEIN. Pour autant, c’est difficile car il faut du temps « et les journalistes sont souvent sous une pression de l’écrit immédiat », a-t-il reconnu. Se référant au livre de M. Nassim Nicholas TALEB, « Le Cygne noir », M. KLEIN a souligné qu’il fallait savoir écouter les cygnes noirs et laisser « plus de place aux interprétations divergentes », ce qui n’est « pas facile », a-t-il admis. « Certes, des règles prudentielles dans le secteur financier ont été très heureusement mises en place mais elles ne résolvent pas tout, loin de là ». Il en est ainsi « des rémunérations variables de ceux qui prennent des risques qui sont étalées sur trois/cinq ans ». Une « très bonne régulation » car elle oblige à voir sur la période la réalité des risques qu’ils ont pris la première année. C’est à ce type de régulations qu’il faut réfléchir, ou encore à développer « des observatoires » tels la Banque des règlements internationaux ou le Haut Conseil de stabilité financière. Ces derniers « doivent être indépendants et donner leurs analyses en avertissant que l’on est peut-être en train de diverger d’un prix fondamental ».

Dès lors, « l’exigence de penser par soi-même est nécessaire, précisément si l’on veut tenter de penser les mutations », a-t-il dit. Pour illustrer son raisonnement, M. Olivier KLEIN s’est intéressé à la question de l’inflation. Dans un premier temps, très nombreux étaient ceux qui pensaient que l’inflation était transitoire, s’appuyant sur des modèles qui poussaient à cette analyse. Or, les modèles étaient fondés sur les données des vingt dernières années. Il y avait là des changements structurels qui s’opéraient et que les modèles ne pouvaient pas prendre en compte, puisqu’ils connaissaient précisément le même schéma depuis vingt ans. Il fallait donc repenser les modèles eux-mêmes.

Pour gérer sereinement, c’est-à-dire sans disruption, les mutations, il faut alors réfléchir à l’essence de son métier, à son utilité profonde, en y distinguant ce qui doit durer, qui doit être protégé, de ce qui relève des conditions d’exercice de son métier qui peuvent se modifier avec le temps. Et cette capacité de réformer en continu est précisément antinomique avec l’esprit de changement brutal.

Autant de convictions qui structurent la vision de l’auteur dans un certain nombre de domaines.

Révolution digitale et intelligence artificielle

La révolution technologique et les modifications des modes de régulation

Les révolutions technologiques qui sont dans le temps long, « dans l’histoire du capitalisme, des moteurs profonds qui permettent de nouveaux gains de productivité, un regain d’efficacité du système et qui nécessitent des réorganisations dans la façon de travailler », induisent des modifications des « modes de régulations de l’économie » et ce, de trois ordres : « des modes de consommation », des « modes de production » et des « normes salariales », a avancé le directeur général du groupe BRED.

Concernant d’abord les modes de consommation, « certains sont incompressibles tel Internet ou le téléphone mobile qui modifient le comportement des consommateurs puisque je peux consommer à distance, bien mieux vérifier, bien mieux comparer, bien mieux m’informer et naturellement, le cas échéant, ne plus me déplacer pour acheter ».

Les modes de production ont également été impactés puisque « progressivement, grâce au digital, à la robotisation, on peut supprimer les tâches répétitives et se concentrer sur les tâches à valeur ajoutée ».

Enfin, pour ce qui est des normes salariales, l’auteur n’a pas caché son peu d’appétence pour un monde, révolution technologique aidant, dans lequel les entreprises, et avec elles la notion de corps social travaillant durablement ensemble, « disparaîtraient progressivement au profit de réunions d’intérêt transitoires rassemblant des personnes qui ont des missions transitoires et qui, une fois leurs missions passées, changeraient de projet ». On ne peut que constater une ubérisation de certaines activités où les gens sont associés sans être salariés. Il en serait de même du télétravail s’il devait être poussé trop loin au-delà d’un minimum nécessaire.

Interrogé par Me Dorothée de BERNIS, avocate associée chez CARLARA, sur sa vision du télétravail et son développement en entreprise, M. KLEIN a estimé que si le travail à distance a été un « bienfait » durant la pandémie, il a aussi ses limites et le développer comme une façon de faire de l’entreprise serait « dangereux », et ce sur plusieurs plans. « L’entreprise est probablement le plus grand lieu de socialisation qui existe dans une société. Quand les gens restent chez eux seuls, à la fin ils s’isolent », a-t-il mis en garde. Quant au huis clos familial, il peut également se révéler difficile. Le télétravail peut, en outre, induire une moindre efficacité lors de la participation à des projets communs en raison, en particulier, de l’absence de communication visuelle, de proximité. Ce mode d’organisation peut aussi conduire certains à travailler trop et, à l’inverse, engendrer une baisse de productivité chez d’autres. Enfin, la généralisation du télétravail est porteuse d’un double risque. En excès, il peut tout simplement abîmer la notion de travail. En continu, il peut aussi menacer l’emploi en France au regard du coût du travail dans le pays. La tentation peut alors exister d’étendre le champ des recrutements hors de l’Hexagone. Pour contrer ce risque, là comme ailleurs, c’est la valeur ajoutée apportée et l’investissement dans une économie de la connaissance et de l’innovation qui doivent primer, a conclu le directeur général de la BRED sur ce point.

L’intelligence artificielle n’est pas intelligente

Poursuivant sa réflexion sur la question de l’intelligence artificielle, M. Olivier KLEIN a considéré que « dans ‘intelligence artificielle’ il y avait un mot de trop : ‘intelligence' ». « L’intelligence artificielle n’est pas intelligente », a-t-il dit considérant qu’il s’agit davantage « d’une capacité extraordinaire de puissance informatique pour traiter beaucoup plus de données ». Elle est, certes, très utile. Pour autant, cela demeure de « l’analyse de données » et si elle représente « un complément à l’humain considérable », l’intelligence artificielle ne « remplace pas l’intelligence, la vraie », a-t-il tenu à souligner.

L’intelligence, la vraie, est d’après lui « multiforme ». S’appuyant sur la définition pascalienne complétée par KANT de l’intelligence, il considère que celle-ci doit être une alliance entre « l’esprit de finesse », « l’esprit de géométrie », et « l’intelligence d’anticipation, de sensibilité ». En effet, si l’esprit de finesse et l’esprit de géométrie « sont deux formes magnifiques d’intelligence », « il vaut mieux les allier, mais elles ne suffisent pas l’une et l’autre pour arriver à prendre des décisions pertinentes ». Pour ce faire, il manque l’intelligence d’anticipation, autrement appelée par M. KLEIN l’intelligence de sensibilité, autrement dit « la sensibilité aux gens et aux choses », ou encore « l’intuition » kantienne, sans laquelle on ne sent pas comment et quand les choses vont se produire. Dans ce cas, on n’a « pas la capacité d’anticiper et donc de prendre les décisions les plus pertinentes », a-t-il démontré.

Révolution digitale et rapports entre producteurs, distributeurs et consommateurs : une inversion pyramidale

Abordant ensuite les enjeux en matière de consommation, M. KLEIN a rappelé qu’avec le développement de « l’industrie de masse » à la suite de la Seconde Guerre mondiale, les chaînes de production se sont développées de sorte « qu’on pouvait produire moins cher et trouver plus de consommateurs ». Parallèlement, prenant le pas sur la rémunération à la tâche, le salariat s’est développé avec en corollaire, pour le salarié payé au mois, la prévisibilité de ses revenus. Dès lors, on a pu développer le crédit à la consommation et le crédit tout court, parce qu’il avait désormais une capacité de planification budgétaire.

On avait alors une pyramide qui partait du producteur, qui était maître des choses, vers le consommateur. L’intermédiaire était alors celui, choisi par le producteur, qui avait la chance de distribuer ses produits au consommateur final, a rappelé M. Olivier KLEIN.

Mais avec la révolution digitale, on assiste désormais à « une certaine inversion pyramidale », a souligné celui-ci. « Avec le digital, est arrivé la capacité du consommateur de bien mieux s’informer, de bien mieux comparer, de bien mieux changer. Il a vraiment pris le pouvoir ».

Les producteurs pouvant désormais vendre en direct, les distributeurs vont-ils pour autant se faire désintermédier ? « Eh bien, je ne le crois pas », a-t-il martelé. Il y a certes des intermédiaires qui disparaîtront. Mais au global, « la contrepartie de cette révolution, c’est que le distributeur, s’il sait trouver la valeur ajoutée à apporter à ses clients, les services, les conseils, et mieux aider le consommateur à trouver la solution optimale pour lui quel que soit le sujet, alors peut-être le distributeur peut-il même prendre le pouvoir sur le producteur dans certains domaines », a-t-il considéré. En effet, s’il sait maîtriser la masse de données en connaissant bien ses clients, au lieu de proposer un seul produit, il saura apporter la solution qui conviendra le mieux à son client en fonction de ce qu’il en connaît intimement », faisant de la valeur ajoutée et de la proximité relationnelle des éléments clés, a développé M. Olivier KLEIN pour qui « les distributeurs ont un rôle fondamental à jouer ». C’est ainsi le distributeur qui, par sa connaissance de son client, ira demander au producteur de lui concevoir tel ou tel produit qu’il saura être adapté à ses besoins. Dès lors, « les producteurs sont plus asservis aux distributeurs que jamais si le distributeur joue bien son rôle ». Avec le développement du digital, la pyramide s’est donc inversée au profit des distributeurs, a défendu ce dernier.

Révolution digitale et management des entreprises : de l’entreprise pyramidale à l’entreprise en réseaux

Pour sa part, l’entreprise, avec le digital, de « pyramidale », est devenue une « entreprise en réseaux » avec « plus d’autonomie pour chacun des acteurs. Ce qui ne prive pas de la nécessité de la norme, de la règle et de la routine de gestion ». Les salariés voient leur travail changer. Le manager qui « n’est plus là pour distribuer l’information » mais « pour apporter de la valeur ajoutée à ses équipes » doit porter ce mouvement. Car « le digital bien pris libère du temps » en éliminant les tâches répétitives au profit de tâches à valeur ajoutée, ce qui passe également par plus de formation. Prenant pour exemple la BRED, son directeur général a indiqué avoir augmenté en dix ans de 40 % la formation en favorisant en parallèle la capacité à trouver plus d’autonomie, plus de responsabilité, plus de valeur ajoutée, en professionnalisant mieux les personnes. La révolution digitale se révèle un atout considérable dès lors qu’on prend le temps de s’en servir valablement au lieu de penser que ça va remplacer les hommes, a-t-il estimé.

Révolution digitale et secteur bancaire

Quant au secteur bancaire, c’est une « erreur » de penser que le digital conduit à une disruption et que les banques de réseau vont être désintermédiées par les néo-banques. Les faits en attestent puisqu’il « y a à peu près zéro banque en Europe, purement Internet, qui soit rentable. Toutes perdent de l’argent, beaucoup ». Pourquoi ? « Parce qu’elles n’ont pas compris que la banque, ce n’était pas que l’univers du transactionnel », a relevé M. KLEIN.

Certes, les applications bancaires ont permis d’autonomiser les clients s’agissant de la banque du quotidien, le digital apportant une praticité bien plus grande et dégageant les clients comme les établissements bancaires, en libérant de leur temps les tâches sans intérêt au profit de celles à valeur ajoutée.

M. Olivier KLEIN en est convaincu, le digital ne peut pas tout remplacer dans les services d’un établissement bancaire. « Depuis dix ans, celles des banques qui, étant persuadées que le digital provoquerait une disruption, n’ont eu de cesse de réduire leur réseau toujours plus, ont certes baissé leurs coûts. Mais leur produit net bancaire a baissé encore plus vite, a-t-il pointé. A l’inverse, celles qui ont su se servir de la révolution technologique pour se réorganiser en profondeur s’en sortent bien, à l’image de la BRED qui a réorganisé le travail de ses équipes, son réseau d’agences sans pour autant le restreindre, et qui a vu ainsi son produit net bancaire beaucoup augmenté, sensiblement plus que ses charges. In fine, le groupe a gagné en efficacité, s’est-il félicité.

Dès lors, la banque « cygne ou phénix » ? « Eh bien, je pense que tout dépend de la façon dont on prend le sujet », a affirmé M. KLEIN. « En pariant sur l’humain, en veillant à l’exigence de la formation, l’exigence de la montée en gamme, l’exigence de la valeur ajoutée, on peut produire quelque chose de durable, naturellement en investissant aussi beaucoup, et sur l’humain, et sur le digital », a-t-il résumé. En prenant « le mieux du vieux » et « le mieux du neuf », il est possible de « surperformer » à l’image de sa banque qui a développé le concept de banque 100 % conseil.

Et de conclure : « Toute mutation est source de danger fondamental si on ne pense pas bien cette mutation. Si on n’anticipe pas et si on ne fait pas l’effort de comprendre l’essence même de son propre métier, on est facilement dans l’idée de la disruption alors que bien souvent, on peut utiliser ce qu’il y a de neuf, ce qui apparaît, les chocs, les révolutions technologiques, pour au contraire approfondir ce qui est au cœur de son métier, le maintenir, le protéger » tout en se réorganisant, bien entendu, pour s’adapter aux nouvelles conditions de fonctionnement. C’est cela qui justifie son utilité sociale et économique.

La crypto-monnaie, une mutation ?

Me Christophe LACHAUX, avocat associé chez CARLARA, s’est interrogé sur le fait de savoir si les crypto- monnaies constituaient ou non une mutation au sens où M. KLEIN l’a développé dans son propos.

« Pour moi, le système monétaire est un système qui permet le règlement des dettes », a répondu ce dernier avec sa casquette de professeur de politique monétaire. Dès lors, « il doit être stable, incontestable et accepté par tous ». Aujourd’hui, cette monnaie, « c’est la monnaie des banques qui sont elles-mêmes régulées par la banque centrale, donc par une institution en dehors des marchés. Et les banques elles-mêmes ne sont pas des participantes au marché au jour le jour », a souligné M. KLEIN. C’est pourquoi la monnaie scripturale est acceptée par tous sauf en cas de défiance vis-à- vis d’une banque. Le cœur du sujet, c’est la confiance dans la monnaie.

Dans ce cadre, « pourquoi la crypto-monnaie ne peut-elle pas être une monnaie et sa valeur ne peut être que zéro, sauf dans des cas d’emballements spéculatifs ? C’est parce qu’une crypto-monnaie peut être créée par n’importe qui ». On gagne peu ou prou 5 % du montant de l’émission, et par effet de mode, le cours peut grimper. Mais le fondement même, c’est que « la crypto-monnaie n’est pas acceptable comme monnaie », a soutenu M. KLEIN. En effet, « c’est la monnaie de quelqu’un qui n’est supervisé par personne ». Si chacun crée sa monnaie, elle ne vaut plus rien car il n’y a plus de contraintes monétaires, a-t-il affirmé. Or, dans un monde de rareté, il ne peut y avoir que de la contrainte monétaire. Il faut que chacun ait une limite dans sa capacité d’acheter. Il faut donc des monnaies qui ne puissent pas être créées par chacun.

En marge du débat, Me Edouard de LAMAZE a, quant à lui, pour conclure, interrogé le directeur général de la BRED sur la question de la finance au regard des enjeux de climat. Face à l’ampleur des enjeux climatiques, il faut que « tout le monde s’y mette » pour l’enrayer, a déclaré d’entrée de jeu ce dernier, et les banques proposent « évidemment à [leurs] clients des produits qui peuvent être plus verts », a-t-il indiqué. Même s’il n’est pas toujours aisé de contrôler qu’il n’y a pas de « greenwashing ». Pour autant, de quel droit une banque pourrait-elle refuser à son client de le financer, à une PME notamment ?

Derrière les injonctions des uns et des autres, la réalité est beaucoup plus complexe et arbitrer n’est pas toujours aisé.

En conclusion, a-t-il estimé, il faut se méfier des faux-semblants, prendre en compte des situations complexes, et bâtir une planification énergétique réaliste. C’est pourquoi ces évolutions majeures ne peuvent être menées à bien sans une planification de la transition énergétique sérieuse. Faisant sien le point de vue de l’économiste Christian GOLLIER, directeur général de la Toulouse School of Economics, et un des auteurs de rapports du GIEC, M. Olivier KLEIN a conclu que c’est aux gouvernements de prendre la responsabilité de gérer ces enjeux et de fixer les règles que les banques doivent appliquer et non l’inverse.

Catégories
Banque Management

Quelle est la stratégie de développement de la BRED ? 

BRED. La Banque sans distance affiche d’excellents résultats au premier semestre 2022. Quelle philosophie se cache derrière son DG et quelle stratégie de développement mène-t-il pour nos territoires ? Entretien. (Texte Audrey Juge)

Vous êtes à la tête du Groupe BRED depuis 10 ans, mais avez aussi dirigé plusieurs banques avant cela, toutes affichant une performance remarquable. Vous êtes également professeur de macroéconomie financière, de politique monétaire et de banque à HEC Paris. Pourquoi avez-vous suivi cette voie et choisi la banque ?

Olivier Klein, directeur général du Groupe BRED : J’ai choisi la banque car j’aime l’économie et je ne voulais pas seulement l’enseigner mais la pratiquer, pour être au cœur de l’action. La banque est, plus qu’aucune autre entreprise, au cœur de l’économie. Et il est nécessaire d’allier une vision économique conjoncturelle, sectorielle et macroéconomique, nationale et internationale, dans l’entreprise bancaire.

Par ailleurs, j’ai toujours voulu enseigner car transmettre un savoir est, à mon sens, essentiel. Et un vrai plaisir. Être dirigeant d’entreprise, c’est aussi faire comprendre et partager avec le plus grand nombre la stratégie menée. En somme, enseigner l’économie m’aide à être un meilleur dirigeant bancaire. Et réciproquement, pratiquer la banque m’aide à être un meilleur professeur d’économie. Et j’aime cette interaction.

J’ai, en outre, découvert, dans ma vie de professionnel de la banque, l’intérêt majeur intrinsèque de cette activité. J’aime la banque sous toutes ses formes, parce qu’elle est fondamentalement utile à l’économie de nos territoires. La banque commerciale, lorsqu’elle est bien pratiquée, permet aux projets, des individus comme des entreprises, de se réaliser. C’est un métier où l’on apprend à connaître ses clients, particuliers ou entreprises, où on les écoute, les découvre, les comprend. Pour leur apporter le plus possible de services et de valeur ajoutée. Quel beau métier, utile et passionnant !

« La BRED continuera à soutenir ses clients face à la crise dans un rapport de confiance réciproque. »

En début d’année, vous nous aviez évoqué la stratégie de la BRED dans nos territoires depuis la pandémie en termes d’accompagnement financier notamment, dont l’octroi de 25 % de PGE en Guadeloupe et le soutien aux entreprises lauréates du concours Stars&Métiers en Martinique. Qu’envisagez-vous aujourd’hui au vu de la conjoncture globale ?

Nous abordons actuellement le début de la sortie des PGE (Prêts Garantis par l’État) accordés depuis 2020. Ils n’étaient pas à rembourser jusque-là. Les pouvoirs publics, par ce biais comme par d’autres, ont très largement protégé l’économie. La matérialisation du risque pris par les banques a donc été limitée jusqu’alors. Néanmoins, nous subissons aujourd’hui un ralentissement de l’économie mondiale, lié, entre autres, aux coûts de l’énergie. Nous connaissons aussi des taux d’intérêt en assez fortes hausses. Nous allons donc devoir faire face à un certain nombre d’entreprises qui vont rencontrer des difficultés. Faire face à ses dettes sera plus difficile. En outre, la hausse très importante en Europe du coût de l’énergie va fragiliser nombre d’entreprises. Cette période va induire un risque crédit plus élevé, donc plus de provisions. 

La BRED a accompagné ses clients pendant toute la période Covid et continuera à les soutenir de façon très pragmatique. Nous allons rester très proches des entreprises dont la trésorerie sera plus tendue et identifier ensemble les leviers pour faire face à la crise dans un rapport de confiance réciproque.

Le lancement de nouveaux produits est-il prévu pour les DOM ?

Oui, nous venons de développer, au sein de la BRED, le paiement instantané par QR code pour notre clientèle spécifiquement dans les DOM. Nous répondons ainsi aux attentes de clients professionnels ultramarins ayant des besoins d’encaissement monétique non-récurrents et ne possédant pas de terminal de paiement. Cette solution s’adresse aussi aux « millennials », friands de nouvelles technologies, de gain de temps et de praticité. Aucune autre banque ne le propose, dans les DOM comme en Métropole.

« L’égalité des chances est une priorité pour le Groupe BRED parce qu’elle est constitutive de la cohésion sociale. »

L’égalité des chances est également une priorité pour le Groupe BRED…

En effet, je crois que l’égalité des chances est constitutive de la cohésion sociale. Une entreprise se doit d’être engagée sociétalement et il est fondamental de développer l’égalité des chances d’un point de vue aussi bien sociétal qu’économique. À la BRED, il est possible de gravir les échelons quel que soit son niveau d’étude, son origine, sa religion ou son sexe si l’on démontre un fort engagement et du talent. Par ailleurs, notre politique de mécénat est tournée en priorité vers des actions menées en faveur de l’égalité des chances et de la transmission du savoir. Nous sommes un des principaux financeurs de l’ADIE (Association pour le droit à l’initiative économique) et la BRED est membre fondateur de la Fondation des Écoles de la 2e Chance, qui ont été créées pour offrir une solution aux jeunes qui sortent du système scolaire. Nous sommes également partenaires du Collège de France, avec notamment un soutien financier de notre part au projet intitulé « Le Campus de l’innovation pour les lycées ». 

En Guadeloupe, la BRED est mobilisée aux côtés de l’association Odyssée qui lutte contre le décrochage scolaire des jeunes en les sensibilisant à l’entrepreneuriat et à l’initiation à la gestion d’entreprise via son programme Business Game School. HEC Stand Up est également un beau programme soutenu par la BRED, qui vise à accompagner les femmes des territoires ultramarins dans leur projet de création d’entreprise.

D’excellents résultats au 1er semestre 2022 : en comparaison du 1er semestre 2021   

  • Produit net bancaire à 827,8 M€ en hausse de 7,4 %
  • 8,6 % du PNB banque commerciale France
  • 39,6 % du Pôle international
  • Résultat net de 266,6 M€ en hausse de 12,4 %
  • Coefficient d’exploitation à 53,9 %
  • Capitaux propres de 5,8 Md€

FOCUS sur la Route du Rhum – Destination Guadeloupe

Après la Transat Jacques Vabre en Martinique, la BRED soutient l’économie bleue en s’engageant, cette année encore, dans la Route du Rhum – Destination Guadeloupe. Selon Olivier Klein, « la Route du Rhum est un événement majeur qui incarne une fois de plus un trait d’union entre la BRED et ses territoires ultramarins. Les valeurs que ce sport exigeant défend, notamment le dépassement de soi et la résilience, sont des valeurs partagées par la BRED. Je reviendrai en Guadeloupe pour célébrer l’arrivée des skippers, en particulier pour accueillir notre champion, Armel Le Cléac’h, à la barre du Maxi Banque Populaire XI qui, je l’espère, terminera en première position ! C’est un bateau high-tech magnifique, toutes les chances sont de son côté ! ».

Merci à Audrey Juge pour cette interview pour le magazine Karumag.

Catégories
Innovation Management

« La révolution technologique ne dissout pas l’entreprise, elle renouvelle le management »

Les nouvelles technologies sont pour la banque tout à la fois des déterminants du changement et des opportunités facilitant les transformations nécessaires. En matière d’organisation, elles ne dissolvent pas l’entreprise, elles renouvellent le management.

La banque évolue dans un environnement éminemment mouvant. Elle doit continuellement s’adapter, en anticipant au plus près les mutations économiques et comportementales, en poursuivant les transformations indispensables à la permanence de son utilité économique et sociale, comme au maintien de sa compétitivité. Les nouvelles technologies sont pour la banque tout à la fois des déterminants du changement et des opportunités facilitant les transformations nécessaires. La révolution technologique, avec l’essor du digital et de l’intelligence artificielle, n’a pas, comme le prédisait un nombre certain de commentateurs, « disrupté » la banque. Bien au contraire, la banque commerciale a su en tirer profit pour pérenniser et renforcer ce qui fait l’essence même de son métier et sa valeur ajoutée : l’intermédiation et le conseil. Son rôle indispensable a d’ailleurs été largement confirmé à la faveur de la crise sanitaire. Cette capacité à se réinventer continuellement au gré des bouleversements de l’histoire nécessite de ne pas céder à la tentation de mouvements browniens, de ne pas se départir de ce qui fait l’utilité de la banque vis-à-vis de ses clients. En cultivant le champ de l’investissement humain, tout autant que celui du digital.

S’il en est ainsi dans les relations entre la banque et ses clients, il en va de même dans son mode de fonctionnement interne. L’organisation classique de toute entreprise, y compris la banque, reposait sur un processus décisionnel centralisé, des relations hiérarchiques très structurées et une information descendante. Ce mode d’organisation n’était plus compatible avec ce qu’a induit la révolution digitale en termes de circulation de l’information au sein de l’entreprise. Mais aussi avec les transformations nécessitées par les profondes mutations en cours. Tout au contraire, s’imposent un fort besoin d’agilité et d’innovation, comme le développement d’un sens et d’un goût de l’entrepreneuriat (ou plutôt de l’intrapreneuriat). Ils sont en effet tous deux nécessaires au processus d’adaptation permanent, seul à permettre de survivre et de se développer dans un environnement très mouvant. C’est aussi le cas du secteur bancaire, cela va de soi. 

Le travail, plus désiré et motivant

Parallèlement, les attentes des salariés ont évolué avec un besoin d’autonomie et une quête de sens croissants. Ils souhaitent comprendre la stratégie menée et se sentir impliqués. Pour les nouvelles générations, le travail doit être encore plus désiré et motivant.

L’ensemble de ces considérations conduit à repenser l’organisation de l’entreprise et le rôle du manager. Il s’agit bien là de repenser l’organisation du travail. Mais non pas de l’ubériser pour répondre à une conception éthérée, vaporeuse même, de l’entreprise qui, grâce au digital, s’apparenterait à une communauté de contributeurs réunie au gré des projets à mener, où le salariat n’aurait plus sa place. Dans une économie de l’innovation et de la connaissance, toutes deux au cœur de la compétitivité, seule l’entreprise, parce qu’elle est dotée de ressources organisationnelles et financières, peut assurer la formation des salariés au long de leur vie professionnelle et répondre à leur besoin d’évolution professionnelle. En outre, toute activité complexe requiert une structure organisationnelle forte, un capital significatif, des infrastructures matérielles et techniques, ainsi qu’une articulation précise entre ses différentes composantes. Ce qui s’accorde mal avec les associations ponctuelles d’individus détachés les uns des autres. La banque en est un exemple évident, parmi tant d’autres. La crise pandémique a de plus mis en lumière les limites économiques, sociales et humaines du télétravail lui-même, qui, tout en étant utile, n’est pas la panacée. Le télétravail est certes efficace pour assurer la continuité d’exploitation et une gestion plus intelligente du temps et des transports, dans nombre de cas de figure. Mais il est impropre à répondre au besoin vital de socialisation que seul le travail en commun, dans un même lieu, permet. Il ne peut pas davantage prétendre à égaler l’efficacité d’une relation, d’une communication et d’échanges fluides et physiques. L’entreprise rassemble ainsi durablement une communauté d’hommes et de femmes dont les projets et l’activité sont utiles à la société et font ainsi sens. Et le digital est à son service. 

De plus, l’entreprise, tel un organisme vivant devant se transformer en continu pour mieux perdurer, doit combiner intelligemment deux principes d’organisation indispensables : d’un côté, le niveau nécessaire d’ordre entre les parties, pour assurer leur coordination et la continuité de l’activité, par le respect de normes et de règles de fonctionnement, les « routines » de gestion. D’un autre côté, l’autonomie et la responsabilisation des équipes et salariés eux-mêmes, qui assurent la souplesse et l’adaptation nécessaires pour prendre en charge les transformations longues indispensables à la survie de cet organisme vivant qu’est l’entreprise.

Autonomie et responsabilisation

Ainsi, pour favoriser l’autonomie et la capacité entrepreneuriale des équipes, la culture managériale doit ainsi, elle aussi, évoluer. Le manager, dont le rôle est fondamental dans la réussite des transformations, doit dorénavant fédérer une communauté d’acteurs autour de projets pertinents pour l’entreprise. Fini le temps du manager superviseur qui assoit son pouvoir sur la détention de l’information. Dorénavant cette dernière est libre et circule dans l’entreprise sans « descendre » aux collaborateurs par la seule hiérarchie. Le manager doit faire partager la stratégie de la banque, donner du sens et des perspectives, être capable d’anticiper les points de blocage, lever les freins au changement. De même, il doit contribuer à former et entraîner les salariés pour leur permettre d’enrichir leurs compétences et leur valeur ajoutée, développer leur capacité à développer leur autonomie et connaître le plaisir de donner le meilleur d’eux-mêmes. Et chaque manager doit organiser la transformation dans son domaine et faire en sorte que les innovations organisationnelles et technologiques soient bien comprises, partagées et vécues. Enfin, le manager doit faire en sorte que chaque collaborateur soit le plus possible lui-même acteur du changement, dans un processus de concertation. Il s’agit là d’une philosophie de l’action et de la transformation.

A ce titre, les nouvelles technologies sont, là encore, très utiles, mais ne « disruptent » pas la notion même d’entreprise et de management. Elles permettent au contraire une meilleure efficacité.

Dans la banque, entreprise de service, cette approche est d’autant plus essentielle que le capital humain est le premier levier de compétitivité. Il faut faire le pari de l’humain face au risque de désintermédiation et d’« ubérisation » de la banque. Le digital est certes nécessaire et utile, mais l’humain est le facteur différenciant.

Ce changement de paradigme managérial est ainsi indispensable à une conduite réussie et la plus harmonieuse possible des mutations en cours. Loin de la « disruption », souvent fruit d’une insuffisante anticipation des évolutions au long cours. 

Catégories
Banque Economie Générale Management Vidéos

« Crises et mutations : petites leçons bancaires » l’interview « La librairie de l’éco » pour BFM Business

L’occasion de revenir sur mes réflexions concernant l’évolution du secteur bancaire et sur l’essence même du métier de la banque. Mais aussi plus largement sur l’histoire du capitalisme et les mutations fortes mais lentes de l’économie et des entreprises induites par  les révolutions technologiques. Loin des disruptions.

Interview disponible en replay sur le site de BFM Business à cette adresse à partir de la 13ème minute : https://www.bfmtv.com/economie/replay-emissions/la-librairie-de-l-eco/la-parole-aux-auteurs-christian-saint-etienne-et-olivier-klein-15-07_VN-202207150666.html

« Crises et mutations : petites leçons bancaires » est disponible en suivant ces liens https://urlz.fr/hv0M ou https://urlz.fr/hv2Q

Catégories
Banque Management

Interview d’Olivier Klein, directeur général du Groupe BRED, dans le rapport d’activité 2021

Quels ont été les résultats du Groupe BRED en 2021 ?

En 2021, le Groupe BRED a enregistré d’excellents résultats, avec un PNB qui s’établit à 1456 M€ et un résultat net de 412 M€, en progression respectivement de 61 % et de 129 % depuis 2012. Le coefficient d’exploitation du Groupe BRED de 55,1 %, comme l’évolution de ses fonds propres, soulignent toute l’efficacité et la solidité de notre banque et sa capacité à contribuer avec ses clients au développement de ses territoires.


Ces succès sont portés par l’ensemble de nos activités, et notamment par la banque commerciale en France qui enregistre en 2021 une augmentation de ses revenus de 5,4 % et une progression cumulée continue de 50 % depuis 2012, surperformant ainsi largement le marché. À l’international aussi, le Groupe BRED a consolidé son positionnement avec un PNB en croissance de 25,7 % à change constant, en dépit de la fermeture des frontières liée à la pandémie dans certains de nos pays d’implantation. Enfin, notre salle des marchés a maintenu un très bon niveau de résultat.


2021 s’est aussi imposée comme une année de reconnaissance pour la BRED. Elle a notamment été retenue par la Commission européenne pour placer ses émissions obligataires, a obtenu le deuxième prix dans la catégorie « meilleure banque privée affiliée » au Sommet du Patrimoine et de la Performance, a été récompensée avec le meilleur plan d’épargne retraite individuel bancaire du marché, et a reçu le label d’excellence des Dossiers de l’épargne. Sans oublier sa filiale au Laos désignée comme meilleure banque corporate du pays.

Mais, au-delà des chiffres et des prix de 2021, ce que je retiens avant tout de cette année, ce qui constitue notre principal motif de fierté collective, c’est la pertinence d’une stratégie initiée depuis dix ans : la Banque sans distance, qui a donné naissance ces dernières années à la « Banque 100 % conseil ». Cette stratégie s’impose comme la source d’une résilience sans précédent dans un contexte toujours aussi contraint par la structure des taux d’intérêt, la révolution technologique aussi bien que plus récemment par la crise sanitaire. Elle nous a éclairés lors de chaque prise de décision pour combiner protection des collaborateurs, accompagnement des clients et soutien aux territoires. C’est elle, appliquée à chacun de nos métiers, qui nous a permis d’obtenir une trajectoire remarquable sur ces dix dernières années.

En quoi la puissance de cette stratégie de Banque sans distance réside-t-elle ?

Derrière ce cap et au socle de notre culture de l’efficacité, figure une philosophie pluridimensionnelle de la proximité et de la valeur ajoutée. La proximité relationnelle avec les clients, tout d’abord, que nous nous sommes efforcés ces dernières années de renforcer et d’améliorer significativement. En effet, la Banque sans distance témoigne de la capacité du Groupe BRED à répondre aux attentes toujours plus fortes des particuliers, professionnels et entreprises de toute taille – tant en termes de relation globale durable que de services et de conseils. Elle témoigne de la relation de confiance que nous nous employons à développer sans cesse davantage : confiance dans notre aptitude à accompagner durablement nos clients dans leurs projets de vie ou d’entreprise. Confiance aussi dans notre capacité à répondre à leurs besoins de financement, de solidité des placements et de protection de leurs données.

Cette philosophie touche aussi la proximité avec les territoires. Nous sommes une banque coopérative dont le rôle auprès des territoires sur lesquels nous sommes implantés en France comme à l’international est particulièrement fort. Nous sommes liés à eux par une osmose, une convergence d’intérêts. Si l’un de nos territoires dégage un jour une plus faible rentabilité que d’autres, l’épargne qui y a été collectée ira financer les développements de projets sur ces mêmes territoires, et ne sera pas affectée à un autre territoire permettant une meilleure rentabilité.

La troisième dimension de la proximité est décisionnelle ; nos clients connaissent les responsables finaux de la BRED comme de ses filiales bancaires, et les décisions y sont prises au plus près du terrain.

Enfin, proximité managériale, qui est tout aussi cruciale, car la banque commerciale est un métier de conseil et la capacité à mobiliser les équipes au profit des clients est différenciante. Nos collaborateurs sont impliqués dans la stratégie, nous leur fournissons des clés pour non seulement la comprendre mais aussi pour en être les acteurs.

La valeur ajoutée du conseil à tous nos clients est l’un des fondements mêmes de notre stratégie. Les clients, mieux informés et plus exigeants, attendent des conseillers dédiés à leurs spécificités et très compétents. Ce que le Groupe BRED s’efforce de proposer et qui s’est traduit par l’émergence de la « Banque 100 % conseil ».

Le Groupe BRED évolue dans deux univers liés mais différents : ceux de la banque transactionnelle et de la banque de conseil. Comment votre stratégie de Banque sans distance vous a-t-elle guidés pour aborder des besoins convergents mais distincts ?

La Banque sans distance, c’est la certitude qu’être parmi les meilleurs dans le numérique est indispensable mais insuffisant. L’avenir du Groupe BRED s’ancre ainsi également dans la philosophie de relation globale de proximité que nous avons évoquée.

Forts de cette conviction, nous avons réalisé un modèle de banque aussi performant dans le domaine transactionnel que les acteurs 100 % en ligne, mais avec un supplément d’âme fondamental qui permet de satisfaire en profondeur les besoins des clients : l’accompagnement personnalisé à forte valeur ajoutée. Nous nous sommes mobilisés pour intensifier la relation globale de proximité que la BRED entretient avec ses clients, sur chacun de ses territoires, en mettant au centre de nos réflexions le capital humain, qui est irremplaçable. Loin de fermer nos agences, nous les avons réorganisées pour les dédier à 100 % au conseil. Nous avons continué à former nos collaborateurs afin de parfaire leur expertise sur le segment de clientèle qu’ils couvrent et ainsi gagner en qualité de conseil, en réactivité et en proactivité.

Parallèlement, nous avons massivement investi dans les nouvelles technologies pour offrir un meilleur parcours client avec, notamment, une application de banque au quotidien reconnue comme l’une des meilleures du marché. En outre, nous avons utilisé le numérique pour libérer nos conseillers et nos fonctions supports des tâches à faible valeur ajoutée. Enfin, nous avons développé des services extrabancaires.

En quoi le statut de banque coopérative est-il, lui aussi, une force ?

Si notre stratégie de Banque sans distance nous guide depuis près de 10 ans, la dimension coopérative représente nos racines. Nos sociétaires sont des clients, hommes et femmes de tous horizons qui participent à la dynamique économique et sociale de nos territoires d’implantation. Ce modèle répond aux attentes de nos clients, comme en témoigne le succès rencontré par les augmentations de capital de la BRED.

Forte de ce statut originel, la stratégie de la BRED ne dépend pas des marchés financiers, de leur volatilité, de leurs effets mimétiques, comme de la pression de très court terme qu’ils organisent. 

Inscrit dans le long terme, inclusif, engagé pour les territoires, notre modèle coopératif est ainsi plus que jamais actuel, tant il répond par essence aux grandes transitions actuellement à l’œuvre, et tant il place la question de l’engagement sociétal au centre de notre modèle, de notre stratégie et de notre gouvernance.

Banque coopérative, sans distance, la BRED fait converger philosophie de la proximité et de la valeur ajoutée, culture de l’efficacité et actionnariat collectif.

Pour faire face demain aux défis à venir, elle continuera à faire vivre ce modèle de capitalisme à impact positif, partenarial, où les clients, les sociétaires mais aussi les collaborateurs, et la société dans son ensemble, figurent au cœur de sa stratégie.

Retrouvez l’intégralité du rapport d’activité 2021 de la BRED